Valentine Robert
Par des élèves du secondaire 1
Maître d’enseignement et de recherche à l’UNIL en histoire et esthétique du cinéma.
Mon Métier
Mon métier (que j’envisage un peu comme une mission!) consiste à redécouvrir et comprendre les créations humaines, et à les faire découvrir et comprendre aux étudiant·e·s. Je travaille plus précisément sur les images, les films, les spectacles, les récits. En retrouvant des films et des tableaux qui ont disparu, en les comprenant, on reconstruit l’histoire. S’intéresser à la création et l’expression humaine est essentiel car penser, créer et imaginer représentent pour moi l’essence même de notre existence.
Ce qui m’inspire et me motive
Apprendre, dans les deux sens du terme : apprendre des autres (découvrir, comprendre) et apprendre aux autres (enseigner, faire découvrir, partager). Ces deux facettes sont toujours réciproques, et j’ai la chance de le vérifier chaque jour avec mes étudiant·e·s. Cette soif d’apprendre est au cœur de mes recherches: les films, les images, les histoires peuvent être considérés comme des « laboratoires imaginaires » permettant des enseignements sur nos vies, nos émotions, notre monde.
Être une femme dans ce contexte
Trois choses m’ont marquée. 1-En tant que femme enseignante, j’ai constaté que mes collègues masculins obtenaient automatiquement plus de respect. Il faut se battre davantage pour obtenir la même écoute et le même crédit. 2-Dans mes cours, j’ai remarqué que les filles osaient moins prendre la parole que les garçons. Je fais attention à leur accorder autant de place et de considération. 3-Mon travail me passionne mais m’occupe à 300%, et la perspective d’avoir un enfant me semble presque impossible.
Valeurs importantes à mes yeux
L’envie d’apprendre, avec toute l’humilité, la curiosité, l’ouverture que cela implique, ainsi que la volonté de toujours faire mieux. Être chercheuse implique de sans cesse aller plus loin, se poser des questions, se renouveler et se dépasser. Or, la valeur qui permet tout cela, qui en donne la force, c’est la passion: le pouvoir d’être portée par quelque chose et de s’y consacrer entièrement. L’image du savant ou de l’artiste passionné a longtemps été associée aux hommes, mais elle est à portée de touTEs.
Une anecdote
À 13 ans, je vais chez une physiothérapeute qui me demande si j’aime lire. Je lui réponds « non », alors que j’adorais lire. Elle me dit qu’en entrant dans son cabinet, je n’ai regardé que sa bibliothèque. Je réalise qu’elle a raison et me rends compte que je me trahis en reniant ce qui me valait l’insulte d’ »intello ». Aujourd’hui, l’adjectif « intellectuelle » est devenu pour moi une qualité que je revendique. J’ai gardé comme leçon qu’il fallait toujours écouter et assumer ses intérêts, quoi que les autres pensent.
Message aux futur·e·s scientifiques
Il est possible d’être une scientifique en sciences humaines. L’image du scientifique est non seulement trop masculine, mais aussi forcément liée aux sciences naturelles. Or, il est tout aussi important d’étudier l’esprit humain et ce qu’il a créé. Même si elles sont presque absentes dans le système scolaire obligatoire, des matières comme l’histoire culturelle, les sciences sociales, l’histoire de l’art, l’étude des civilisations, des médias, des récits, sont des domaines essentiels de l’investigation scientifique.
Portrait par Violette, Rita, Eva, et Héloïse, 10VP3, L’Élysée, Lausanne
Illustration : Maurane Mazars